Camille dans le livret de la Fondation

La fondation américaine a édité un livre basé sur la vie des personnes porteuses de la délétion 22q13.

L’histoire de Camille, écrite par Philippe son papa, est à l’intérieur…

Le texte en français:

J’AI TANT DE CHOSES A VOUS DIRE

 

 » Dans le ventre de maman, j’étais un bébé mystérieux, mais les tests génétiques n’ayant rien décelé, le gynécologue a décidé qu’à 7 mois et demi, je devais m’imposer malgré mes 1650g.

 

Mes premières semaines, je les passe en couveuse. C’est à l’hôpital, que je fais la connaissance de ma sœur Chloé et de mon frère Maxime.

A un mois, je découvre enfin ma maison. Que du bonheur !

Aujourd’hui quand quelqu’un manque dans cet univers familial, malgré mon emploi du temps structuré, souvent j’angoisse, je crie et prépare mon vélo pour aller le chercher de jour comme de nuit, ou qu’il soit. Ca fatigue mes parents et trouver l’activité qui pourra faire diversion n’est jamais simple.

 

A 6 mois on me découvre une bronchomalacie, je fais des bronchiolites à répétions. J’emprunte trop souvent le chemin de l’hôpital. Quand ce n’est pas pour les problèmes pulmonaires (qui cesseront à 6 ans) c’est pour un tas d’examens afin de comprendre mon retard.

Je progresse très lentement. A plus d’un an j’arrive à me tenir assise. A 2 ans je marche avec soutien et à 3 ans je fais mes premiers pas. Quelle victoire, j’explore enfin de nouveaux horizons.

Pour les bêtises, demandez au chat, à la vaisselle ou encore aux livres ce qu’ils en pensent, mais surtout n’en parlez pas à mes parents…

 

Coté langage, je babille vers 1 an puis reste muette jusqu’à 3 ans et demi… Ma mère est fière de mon premier mot qui est bien évidemment « maman ».

Aujourd’hui, l’oralisation n’est toujours pas mon point fort mais je fais de très gros efforts pour me faire comprendre, grâce à la « Dynamique Naturelle de la Parole », qui m’aide à produire les sons.

J’ai eu la chance de croiser une orthophoniste qui m’a initiée à la langue des signes, et petit à petit, j’ai appris à dire avec mes mains ce que ma bouche n’était pas prête à exprimer. J’ai ainsi offert à mes parents, frère et sœur, par ma différence, le bonheur de découvrir ce nouveau langage.

Ma communication complètement mixte s’enrichit de jour en jour et c’est l’élément incontournable de mon épanouissement.

A plus de 5 ans je suis enfin propre le jour. Ouf j’étais de plus en plus gênée d’être mouillée !

A 6 ans on perce mon mystère avec 5 caractères incontournables « 22Q13 ». Mais finalement pour mes parents l’énigme reste entière et leur vie bascule vers une perpétuelle quête d’informations et d’échanges.

 

Mes parents ont une devise : faire avec moi comme avec ma sœur et mon frère, ne rien s’interdire en adaptant mon environnement. Ainsi à 4 ans je prends l’avion pour l’Equateur et à 9 ans je passe un mois en Inde et …j’aime ça ! (sauf les éléphants, ils sont trop gros).

A la maison tout le monde me soutient, m’encourage. Chacun guette mes progrès et les valorise en s’appuyant toujours sur ce que je sais faire et en oubliant le reste.

Je suis fière de savoir lacer mes chaussures, c’est Corine mon ergo qui m’a appris. J’ai mis longtemps mais elle est patiente et a confiance en moi.

 

Je connais l’alphabet, travaille la lecture avec plaisir, sais écrire mon prénom, compter jusqu’à 7. J’adore le sport même si je ne sais pas courir et commence juste à savoir sauter. 

 

Coté loisir, j’aime me trémousser en écoutant mes CD. Le rose, c’est mon préféré, je lui parle comme à une personne, un confident, je lui demande son avis pour mes activités. Il est toujours d’accord c’est super. J’adore monter à cheval, jouer dans la piscine ou faire du vélo adapté.

Je sollicite continuellement les adultes. Sans réponse… j’insiiiiiiiiiste.

J’aime rigoler et j’ai beaucoup d’humour, et ça mes parents adorent. Par contre, je vois bien qu’ils n’apprécient pas de me voir débarquer dans leur lit à 5h, mais c’est trop bon !

De toute façon s’ils dorment mal c’est plutôt à cause des problèmes avec les institutions et les administrations. Les décisions d’orientation aberrantes, par exemple, ça les rend malades. Ils s’épuisent à essayer de faire respecter mes intérêts, et mes droits les plus élémentaires.

 

Toutes ces choses, c’est ma vie, mon quotidien. Mon avenir, c’est mon secret.

Seules les personnes attentives qui prendront la peine de me découvrir, de s’adapter à mon mode de communication auront le privilège de le partager et de l’enrichir ».

 

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